Comment encourager davantage d’apprenants à choisir les STEM à l’école ? En développant l’enseignement fondé sur des projets et l’apprentissage par l’expérience, et en transformant l’apprentissage en une expérience visant à l’acquisition de compétences de vie plutôt qu’à l’obtention de résultats d’examens.
Telle est la vision de Kavita Sanghvi, directrice de la Chatrabhuj Narsee Memorial School à Mumbai, en Inde. Enseignante depuis 21 ans, Kavita a toujours aimé le défi de la « découverte » et transmet à présent cette compétence à ses apprenants grâce à une approche d’enseignement expérientielle innovante.
L’un des principaux objectifs de Kavita en tant qu’éducatrice est d’encourager davantage de filles à choisir des matières scientifiques et à entreprendre des carrières dans ces domaines.
Elle se reconnaît dans les filles qui rencontrent des obstacles pour étudier les STEM. « Mes parents m’ont toujours beaucoup soutenue. Mais traditionnellement, les matières scientifiques ne sont considérées comme utiles que si l’on devient médecin ou ingénieur. Or, la société s’attend encore à ce que les femmes se marient et fondent une famille, et l’investissement de moyens financiers dans la poursuite d’études des filles est souvent considéré comme un "gaspillage" ».
Publié en 2017, le rapport de l’UNESCO Déchiffrer le code : l’éducation des filles et des femmes aux sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STEM) rend compte de cette réalité.
Il montre que le choix des STEM dépend des normes sociales, culturelles et de genre. « Les filles sont souvent amenées à croire que les STEM sont des matières "masculines" et que la capacité des femmes dans ces domaines est intrinsèquement inférieure à celle des hommes. Ces croyances peuvent saper la confiance et l’intérêt des filles et les détourner des STEM. »
Pourtant, Kavita s’est consacrée à sa passion de la science et a obtenu un master en physique nucléaire ainsi qu’un master en éducation. Elle est la preuve que les STEM ne sont pas réservées aux garçons, et elle encourage aujourd’hui d’autres filles à suivre son exemple.
Une nouvelle façon d’enseigner pour orienter les filles vers les STEM
En devenant directrice de la Chatrabhuj Narsee Memorial School, Kavita a très vite remarqué que de nombreux apprenants, en particulier des filles, délaissaient les STEM. Elle a également constaté que certains élèves qui excellaient dans le secondaire rencontraient des difficultés à l’université.
« J’ai compris qu’au lieu des aptitudes scolaires, l’enseignement supérieur privilégiait les compétences de collaboration, de pensée critique, de mise en réseau et de créativité. Cette tendance se retrouve dans le monde de l’entreprise et dans l’industrie. Pour autant, le programme scolaire national ne formait pas à ces compétences. »
« Je savais que nous devions changer notre façon de faire. J’ai donc proposé à mon équipe de repenser notre manière d’enseigner du CP à la 3e. »
Faire de l’apprentissage des STEM une expérience
Avec son équipe, Kavita a transformé la façon d’assurer les cours dans son établissement. Elle parle elle-même de « perspective globale ». Cette nouvelle approche met l’accent sur l’apprentissage expérientiel et relie chaque sujet à l’un des objectifs de développement durable des Nations Unies.
« Cette approche transformatrice intègre des scénarios réels comme le jour de la lessive, la vaisselle et la fabrication du savon. Il s’agit d’un apprentissage expérientiel qui forme en parallèle aux STEM », explique Kavita.
L’apprentissage expérientiel est un nouveau modèle d’éducation qui fait son chemin dans les salles de classe du monde entier. Des études montrent qu’il aide les apprenants à associer les notions abordées en classe à des situations concrètes.
En quatre ans à peine, les résultats sont déjà visibles.
« Nos élèves participent à des événements interscolaires et gagnent des prix », déclare fièrement Kavita. « Et nous avons fait partie des dix finalistes du World’s Best School Prize for Innovation. »
Sensibiliser aux opportunités de carrière
Kavita se passionne pour la promotion des STEM dans son école et encourage les filles à poursuivre des carrières dans ces domaines. « Tous les ans, nous invitons les universités à participer à notre salon de l’emploi. Nous organisons aussi un événement appelé Hi-STEAM, qui combine l’histoire et les STEM. »
« L’année dernière, le thème était L’espace et au-delà, et nous avons accueilli des femmes astronautes de l’Organisation indienne de recherche spatiale (ISRO) », explique Kavita, qui profite de ces événements pour mettre à bas les stéréotypes. « Cette année, le thème est La gamification dans les STEM. »
Kavita constate que la rencontre avec des modèles féminins invités à assister aux journées d’orientation professionnelle et aux expositions scientifiques motive ses apprenantes à s’orienter vers les STEM.
Cette observation correspond aux conclusions du rapport Déchiffrer le code de l’UNESCO, selon lequel les mentors et les modèles peuvent encourager les filles à poursuivre des études dans ces domaines. Selon le rapport, « La présence de modèles féminins dans les matières des STEM permet d’atténuer les stéréotypes négatifs sur les aptitudes sexospécifiques et d’offrir aux filles une compréhension authentique des carrières des STEM. Ces modèles peuvent conduire les filles et les femmes à revaloriser leur image d’elles-mêmes et leurs attitudes à l’égard des STEM, ainsi qu’à renforcer leur motivation à poursuivre des études dans ces domaines. »
L’avenir de l’apprentissage
Kavita pense que la mise en œuvre de l’approche expérientielle de l’enseignement dans les salles de classe de demain permettrait de transformer l’éducation et d’encourager les filles à choisir les STEM.
« Nous passons d’une classe centrée sur l’enseignant à une classe où les apprenants sont beaucoup plus impliqués. En tant qu’enseignants, nous devons leur donner des ressources pour s’exprimer et la capacité de le faire. »
Pour Kavita, la salle de classe de demain intègre l’informatique spatiale. « Je vois un conservateur guider les apprenants dans une visite des pyramides d’Égypte, et je nous vois rejoints par une école européenne. Je vois un espace où nous sommes tous connectés et collaborons virtuellement, sans frontières. Je crois que c’est l’avenir de l’apprentissage des STEM : où que nous soyons, nous serons connectés au reste du monde. C’est l’essence même de l’apprentissage expérientiel. »
En savoir plus sur la campagne #TeachersTransform dans le cadre du Sommet sur la transformation de l’éducation.